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Sr. Marina Mejía : « La spiritualité de Marie Poussepin: Accompagnement des et/ou entre les sœurs »

on 20 Avr, 2020
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Par SR. MARINA MEJÍA T. (États-Unis).- Il est normal que dans notre vie spirituelle nous ayons toutes besoin d'être accompagnées ; généralement nous nous trouvons dans un de ces deux cas : accompagner ou être accompagnée, par quelqu'un d'autre

Lorsque nous parlons d'accompagnement, dans notre vie religieuse ou spirituelle, nous pouvons nous référer à l'un ou l'autre de ces deux moments. Il me semble cependant que dans les deux situations, les mêmes principes s'appliquent, les mêmes qualités sont attendues de nous et les mêmes résultats seront le don du Seigneur pour chacune. Tant qu'il y a un bout de chemin à parcourir, nous avons besoin d'accompagnement, car dans l'économie du Salut, il semble clair que, personne ne marche seul.

L'essentiel est alors de comprendre pourquoi et comment cet accompagnement doit être réalisé.

Nous pouvons souvent nous décourager en pensant et en sentant que nous sommes seules à chercher le Seigneur, et ce tout simplement parce que nous oublions la promesse du Seigneur, si clairement exprimée dans sa Parole.

Le prophète Malachie nous rappelle que dans notre vie spirituelle, tant la préparation que la recherche elle-même sont entre les mains du Seigneur : "Voici ce que dit le Seigneur : Voici que j'envoie mon messager pour me préparer le chemin. Et soudain, le Seigneur que vous cherchez viendra au Temple" Mal. 3,1

Je me demande alors, pourquoi s'inquiéter ? La foi me dit que tout me sera donné au moment opportun ! Nous savons cependant que le résultat ne sera un réalité, qu'après un long et pénible effort. Qui est ce messager ? Que doit-il/elle faire ? Comment pourrai-je l’identifier ? Puis-je voir clairement ? Est-ce que je veux vraiment voir ? Suis-je prête à accepter de le trouver ? Pourquoi faut-il m'envoyer un messager ? Quel est son travail et son rôle ? Le Seigneur ne peut-il pas me parler directement ?

Ces questions et bien d'autres sont celles de mon amour propre et de ma suffisance, car je pense tout savoir ! je pense pouvoir faire face seule à n'importe quelle situation ! L'histoire du jeune Samuel qui dort dans le Temple du Seigneur est un exemple clair de quelqu'un qui doit nous montrer la voie à suivre. Après s'être entendu appelé par le Seigneur à trois reprises alors que Samuel ne pouvait pas reconnaître la présence et l'action du Seigneur, c'est le Grand Prêtre, Elie, qui reconnaît finalement l'appel du Seigneur et instruit le jeune Samuel afin qu'il puisse donner la réponse appropriée : "Parle, Seigneur, ton serviteur écoute".

Voyons donc la réalité de la recherche, dans cette situation où je me trouve, et l'effort pour identifier la volonté du Seigneur dans ma vie.

Gen. 15, 7-21

"Yahvé lui dit : "Je suis Yahvé qui t'a fait sortir d’Our de Chaldée pour te donner ce pays en héritage." Abram lui demanda : "Seigneur, comment saurai-je que je l’ai en héritage ?" Il lui dit : "Apporte-moi une génisse, une chèvre et un bélier, tous âgés de trois ans, une colombe et une tourterelle", et il prit les animaux, les partagea en deux et en plaça chaque moitié en face de l'autre. Les oiseaux, il ne les partagea pas. Comme les rapaces planaient au-dessus des carcasses, Abram les chassa. Alors que le soleil était sur le point de se coucher, Abram tomba dans un profond sommeil et une terreur et une obscurité profonde s'emparèrent de lui... Quand le soleil se fut couché et qu'il fit nuit, une sorte de brasier fumant et une torche enflammée passèrent entre les morceaux d’animaux. Ce jour-là, Yahvé conclut une alliance avec Abram..."

Il est clair que nous avons besoin d'une sécurité, d'une aide, dans la longue et douloureuse identification de l'offrande, que le Seigneur nous demandera et alors, nous aurons besoin non seulement de patience, mais aussi, de compréhension, de confiance et de courage.

Plusieurs étapes semblent évidentes dans la relation d'Abram avec le Seigneur. Examinons-les :

C'est Dieu lui-même qui demande le sacrifice, après qu'Abram ait voulu s'assurer que la promesse du Seigneur s'accomplira : "Comment saurai-je que j'hériterai de la terre ?" " Apporte-moi une génisse, une chèvre et un bélier, tous âgés de trois ans, une colombe et une tourterelle ”.

Les exigences du Seigneur sont claires et précises : le matériel de l'offrande sera prélevé sur les possessions d'Abram : des animaux adultes, considérés comme purs et dignes d'être sacrifiés au Seigneur. Cependant, la présente offrande ne suffit pas, car nous pouvons nous demander : comment le sacrifice sera-t-il consommé ? Où est le feu qui peut le consommer ? Comment Abram saura-t-il si l'offrande a été vraiment acceptée par le Seigneur ?

Le fait d'offrir le sacrifice ne suffit pas, car Abram a été obligé de faire un acte de foi totale, de confiance, et d'attendre jusqu'au moment où Dieu lui-même a fourni le feu, qui devait consommer le sacrifice, symbole qu'Il avait accepté. Pendant ce temps, Abram a dû se battre toute la journée, défendant son offrande contre les rapaces et contre tout ce qui pourrait menacer la totalité et la pureté du sacrifice : "Les rapaces planaient au-dessus des carcasses, mais Abram les chassait. " Quand le soleil se fut couché et qu'il fit nuit, une sorte de brasier fumant et une torche enflammée passèrent entre les morceaux d’animaux

C'est Dieu qui demande, qui suggère, notre don et qui, à la fin, choisit le don que nous devons lui faire. C'est Lui qui fournit le feu qui doit le consommer ! C'est la vérité de la totalité de Son action dans ma vie ! En même temps, c'est aussi la réalité de sa présence en moi et de ma présence en Lui ! Rien ne se passera sans qu'Il le fasse ! Rien ne se passera également, si je ne me soucie pas de défendre le sacrifice, de tout ce qui menace de le détruire. C'est la leçon que je dois apprendre :
 

C'est un fait que, ces rapaces qui ont menacé l'offrande d'Abram, sont également présents dans ma vie. Alors, comme Abram, je serai obligée de les identifier, de les effrayer, pour défendre mon don. Ils sont souvent très forts, et parfois ils se cachent et se camouflent, mais ils sont terriblement réels dans ma vie.

C'est pourquoi l'accompagnement est nécessaire : a) pour pouvoir identifier ce qui, en moi, essaie de voler, de détruire une partie du don, b) pour utiliser les bonnes armes, pour chasser tout ce qui menace mon don ; le préservant ainsi, dans sa pureté et sa totalité, jusqu'au moment où Dieu lui-même viendra apporter avec lui le feu de son amour, pour consommer l'offrande que j'ai essayée instamment de défendre et de protéger.

C'est là que la présence du messager sera claire ! Chacune des personnes qui apparaissent dans ma vie apporte avec elle et m'offre le courage dont j'ai besoin pour continuer la lutte et garder le sacrifice intact, jusqu'à Son arrivée ; alors il pourra être consumé dans le feu de son Amour !

Marie Poussepin nous donne-t-elle des orientations claires à cet égard ? Se préoccupe-t-elle seulement de la totalité du don ou aussi de l'identification et de l'accueil des messagers qui me donneront le courage de rester éveillée et prête, jusqu'à l'arrivée du Seigneur ?

Marie Poussepin dans ses "Règlements" est très claire, quand il s'agit du besoin des unes par rapport aux autres, dans ce chemin de sainteté, si nous voulons arriver au don total de nous-mêmes. Pour elle, le messager semble être chacune des Sœurs de la communauté, mais en réservant la première place à la Supérieure.

Comment le messager présentera-t-il son message ?

Examinons les Règlements :

Chapitre 2 : L'union et de la charité des Sœurs entre elles

La Charité mutuelle, qui doit se trouver entre les personnes de la Communauté, doit être réglée par celle que Jésus-Christ a pour les hommes et ne doit pas être fondée sur la parenté ou l'affinité, la conformité de caractère ou certains avantages reçus ou à recevoir et ne doit pas rechercher ses propres intérêts …

La vraie Charité, en revanche, les conduira à la cordialité, à l'affabilité, à l'attention mutuelle et à la déférence en toute chose. Elle les engagera à se supporter mutuellement dans leurs faiblesses et leurs imperfections ; elle les incitera à toujours juger favorablement les actions des autres ou à excuser l'intention, lorsqu'elles ne peuvent justifier les actions. Cela leur donnera aussi le courage de pratiquer le précepte de l'Évangile qui nous commande de prévenir nos frères, avec prudence et douceur, de leurs défauts afin de détruire le mal qui peut en découler, en se surpassant elles-mêmes.

Chapitre 3 : De l'humilité

Elles considéreront souvent leurs faiblesses et leurs misères et se diront souvent qu'elles ne méritent rien sans Sa grâce.

Les raisons de cette vertu (humilité) amèneront les Sœurs à ne se préférer jamais à qui que ce soit, ni intérieurement ni extérieurement... tous ces avantages ne les amèneront jamais à s'élever au-dessus de quiconque ou à rechercher l'estime et les louanges des hommes...

Elles banniront de leur cœur tout ressentiment, toute émotion contre ceux qui leur causeraient ces peines.

Pénétrées par ces sentiments, elles appréhenderont les emplois qui ont quelque éclat.

Chapitre 19 : De la part de la maîtresse des novices

Elle s’appliquera d'abord de leur faire connaître, le plus parfaitement qu’il lui sera possible, notre Seigneur Jésus-Christ.

Chapitre 17 : Des vertus et des qualités que doit avoir un supérieur

La Supérieure doit être instruite des vérités du salut, afin d'instruire ses Sœurs à leur sujet... Elle leur donnera les avis nécessaires sur ce qu'elles pourraient lui proposer. Elle clarifiera leurs doutes ...

Une Supérieure, qui a su découvrir le caractère des personnes dont elle a la charge, veillera à ne pas utiliser les mêmes remèdes pour tous les maux dans lesquels elles peuvent tomber... elle sera vive ou lente, douce ou sévère selon les besoins ... Elle encouragera les faibles, consolera celles qui, malgré leurs bons désirs, ne laissent pas que de faire des fautes. Elle saura diriger les personnes les plus sensibles, qu'on ne saurait toucher sans leur faire de profondes blessures.

- Qu'elle emploie plus volontiers la douceur que la sévérité, et que la vue des défauts des autres ne lui fasse pas oublier son néant.

- La Supérieure se fera un devoir de ne jamais faire de corrections lorsqu'elle sera émue, ne le fût-elle que légèrement. Elle ne sera pas moins attentive à les différer lorsqu'elle s’apercevra que l’humeur domine la personne qu'elle doit réprimander, de peur de l'exposer à de plus grandes fautes que celles auxquelles elle veut remédier.

Le rôle du messager est de rappeler que le Seigneur vient et que nous devons constamment être prêtes à le recevoir. Avons-nous la foi et la confiance nécessaires pour accepter ces messagers qui ne cherchent qu'à nous aider à éloigner ces oiseaux de proie qui tentent de détruire le don avant l'arrivée du Seigneur ?

Chapitre 3 : De l'humilité

Nous rappelle :

- L'humilité nous rend tout facile, parce qu’elle attire l'attention de Dieu sur notre oraison, fait descendre sur nous les secours du ciel et nous rend maîtres de nous-mêmes. Elle engage le Seigneur à se souvenir de nous dans nos disgrâces et à nous délivrer de nos ennemis.

...  qu'elles ne perdent jamais la mémoire des choses qu'Il a commandées ; qu'elles repassent souvent, dans leur esprit, qu’Il sera Lui-même la récompense de celles qui L'aiment et Le servent.

... Elles prendront une bonne part les avertissements qu'on jugera à propos de leur donner. Nous sommes toutes sujets à une infinité de défauts. Il y a de l'orgueil se chagriner trop considérablement des fautes qui nous arrivent et surtout à s’abîmer dans le chagrin et le découragement pour les choses que Dieu est prêt à nous pardonner ... et que, si elles réussissent en quelque chose, ce n'est que par la grâce de Celui qui est l'Auteur de tout bien.

...L'humilité est comme le fondement de tout l'édifice spirituel.

Chapitre 2 : De l'union et de la charité des sœurs entre elles

Il nous le rappelle encore une fois :

"... La vraie Charité vous portera à la cordialité, à l'affabilité, à se prévenir mutuellement et à se déférer en tout. Elle les engagera à se s’entre-supporter mutuellement dans leurs infirmités et leurs imperfections. Elle leur inspirera de juger toujours favorablement des actions des autres ou à excuser l'intention lorsqu'elles ne peuvent pas justifier leurs actions”.

Il est clair que cette œuvre de sanctification demandera à chacune de nous de persévérer, aidée et encouragée par le messager qui annonce la présence du feu qui consommera le don.

Mais la persévérance ne suffit pas ! Elle doit être précédée d'une honnêteté et d'une vérité totales dans nos vies.

Le don original, dans toute sa pureté et son enthousiasme, doit être présent jusqu'au bout, sinon cela signifie que les oiseaux de proie ont pu endommager et voler des parties de l’offrande. La persévérance nous donnera l'amour, la confiance et la certitude capables de nous tenir éveillées, jusqu'à la venue du Seigneur.

Je sais cependant que mon amour se nourrit de la foi et de la confiance en sa Promesse et qu'il est soutenu par la certitude de son Amour et de sa Fidélité !

Il y a une attitude de persévérance que seul l'amour peut donner ! Le roi David est un exemple clair dans le Psaume 132, 1-5 :

" Souviens-toi, Seigneur, de David et de sa grande soumission
quand il fit au Seigneur un serment, une promesse au Puissant de Jacob :
« Jamais je n'entrerai sous ma tente, et jamais ne m'étendrai sur mon lit,
j'interdirai tout sommeil à mes yeux et tout répit à mes paupières,
avant d'avoir trouvé un lieu pour le Seigneur, une demeure pour le Puissant de Jacob.
 

Cette attitude du roi David est celle que chacune d'entre nous avait le jour de sa profession religieuse !

Cependant, nous ne pouvons pas oublier la réponse donnée à David par le prophète Nathan: "Es-tu celui qui me construira une maison pour que J'y habite ? Le Seigneur vous révèle aussi que c'est Lui qui vous construira une maison" !

Il est donc clair que l'œuvre de ma sanctification ne sera pas le résultat de mon travail ! Le Seigneur effectuera tout le travail à travers mes sœurs, ma communauté, préparant ainsi leur arrivée dans cette maison qu'Il a Lui-même construite !

Demandons au Seigneur de nous aider à adopter cette attitude, à passer le reste de notre vie à défendre et à protéger notre don, jusqu'à ce que le feu de son amour puisse le consumer pour Sa plus grande gloire ! Convaincues que chaque personne que nous rencontrons sur notre chemin est un messager de son amour et de son souci pour nous, nous aidant à croire et à accepter que, par elle, le Seigneur Lui-même construit cette maison, dans laquelle il habitera pour toujours !

Alors nous accepterons tous les messagers que Son amour envoie dans nos vies ! Nous saurons avec certitude que la promesse du Seigneur, comme pour Abram, sera accomplie. Nous recevrons la Terre promise !  Et, autant que possible ici sur terre, nous réaliserons le désir de notre Mère Fondatrice pour chacune de ses filles :

"Connaître Jésus-Christ et ses mystères".