5ème Dimanche de Carême : « Un amour qui transforme »

on 18 Mar, 2021
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Réflexion : Cinquième Dimanche de Carême : Jr 31, 31-34 ; He 5, 7-9 et Jean 12, 20-33

Bangalore (L'inde), 21/03/2021, Sr. Anula Irvin Suguna.- Le ton du Carême change progressivement, devenant de plus en plus intense à mesure que nous avançons vers l'heure suprême, qui culminera avec la passion et la mort de Jésus.

Durant ce parcours de carême, nous avons rencontré le Jésus victorieux dans les tentations, le Jésus glorieux dans la transfiguration, le Jésus révolutionnaire dans le temple, et le maître radical dans le discours à Nicodème. Aujourd'hui, à travers la figure du grain de blé, Jésus nous enseigne une grande leçon : il est nécessaire que le grain meure pour qu'une nouvelle vie puisse en surgir. 

Dans la première lecture, Jérémie prédit l'établissement d'une nouvelle alliance, remplaçant l’ancienne du mont Sinaï. Cette alliance ne sera plus écrite sur des tables de pierre, mais « je l'écrirai dans vos cœurs » (Jr 31,33) ; il s’agit d’une alliance d'amour, et non un devoir ou une obligation à remplir ; elle ne passe pas par la médiation humaine, mais par le Fils de Dieu lui-même ; et elle n'est pas ratifiée par le sang d'un mouton ou d'un bœuf, mais par le sang précieux du Christ. Il s'agit d'une alliance universelle, qui ne lie pas seulement une race ou un peuple, mais inclut toute l'humanité, « tous me connaîtront, du plus petit au plus grand » (Jr 31,34).

Prenant un exemple de la nature : « En vérité je vous le dis, si le grain de blé ne tombe en terre et ne meurt, il reste seul ; mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruits » (Jn 12, 24), Jésus explique le sens de l'amour rédempteur par sa croix, sa mort et sa résurrection. De même que le grain se décompose dans la terre pour donner une nouvelle vie et porter du fruit, de même lui, par ses souffrances et sa mort, nous sommes guéris (1 P 2,24) et nous a donné à tous une vie nouvelle. C'est le prix qu'il a payé pour nous procurer la liberté et la réconciliation, pécheurs que nous sommes, en obéissant au plan de Dieu et en se dépouillant lui-même jusqu'à la mort sur la croix (Ph 2,7).

Dans la nature, il y a des grains ou des graines qui se perdent, des graines qui ne donnent jamais fruits. Il y a des graines qui ne s'ouvrent pas parce qu'elles ne veulent pas faire l'expérience inconfortable de la mort. Nous aussi, nous pouvons être comme une de ces graines, laissant toute notre vie se corrompre, sans jamais produire de fruit. Cependant, nous pouvons aussi choisir d'être des graines qui acceptent de mourir, d'être fécondes, de donner la vie et d'être transformées par elle.

Que signifie être un bon grain de blé dans notre monde actuel ? C'est avoir la loi de l'amour inscrite dans notre cœur et la faire rayonner, c'est penser moins à soi et plus aux autres, c'est sortir de sa coquille égoïste et prendre soin des autres. Nous faisons le passage de la mort à la vie chaque fois que nous aimons nos frères et sœurs. « Celui qui n'aime pas demeure dans la mort » (1 Jn 3, 14). « Car l'amour brise les chaînes qui nous isolent et nous séparent, en construisant des ponts... l'amour connaît la compassion et la dignité » (Fratelli Tutti, 62), nous appelant à nous engager en donnant notre temps, notre énergie, en mettant de côté nos désirs, nos projets et en prêtant attention à ceux qui en ont vraiment besoin comme l'a fait le bon Samaritain. (Lc 10, 25-37).  L'amour a la capacité de se laisser aller, de se perdre, de se laisser transformer. Elle sait que, pour donner la vie, elle doit devenir méconnaissable, inaperçue, mais en même temps, elle doit être vivifiant.

« Dieu, qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont il nous a aimés, alors que nous étions morts à cause de nos offenses, nous a rendus vivants avec le Christ » (Éphésiens 2, 4). Ce temps nous invite à contempler notre Seigneur qui par amour souffre pour vous et pour moi, blessé, battu, moqué, humilié avec un cœur brûlant d'amour pour toute l'humanité.

Le Christ souffre aujourd'hui dans nos frères et sœurs ; nous sommes constamment confrontés à un monde blessé autour de nous, où la douleur et la souffrance sont devenues la réalité de nombreuses personnes. L'indifférence à cette souffrance, le fait d'ignorer les autres et de fermer les yeux sur elle peuvent être un moyen facile de jouer la carte de la sécurité.

La graine qui s'est laissée transformer est incapable de tourner le dos à toute souffrance. C'est pourquoi l'amour de la graine donne une nouvelle vie pour toujours ou bien elle reste tout simplement stérile. La graine est là pour donner la vie et c'est pourquoi elle ne peut jamais la reprendre, sa nature est de donner et d'aimer abondamment, sans réserve.

Posons-nous la question :

- Comment puis-je être transformé par un processus de mort afin de donner la vie ?

- En répondant à l'invitation de Dieu à ma propre transformation, quels sont les moyens faciles et sûrs auxquels je dois renoncer pour répondre à la souffrance de mes frères et sœurs ?