Page 6 sur 7
Quelques gouttes de spiritualité pour la Justice, la Paix et l’Ecologie
La Charité ou les actions caritatives ?
Sr. Nícida Amparo Díaz, délégué de Justice et Paix - El Caribe.- Chaque fois que je réfléchis au sujet de la Charité , je contemple un monde où la misère des misérables : indigents, drogués et alcooliques, femmes dégradées dans leur dignité, enfants des rues: garçons et filles, hommes et femmes fouillant les poubelles pour trouver quelque chose à manger, jeunes sans horizon pour leur vie, réfugiés, immigrants, guerres, désolation, malades... est la réalité qui nous est servie comme pain quotidien... Comment et de quelle manière Marie Poussepin répondrait à tant de misère, à tant de solitude, à tant de souffrance ?
Un simple et profond parcours par les entrailles des sources de notre Congrégation
La misère et la miséricorde s’embrassent
Dourdan avait aussi son lot de misères accompagnées de la faim, des épidémies qui frappaient aux portes jour après jour... Marie Poussepin, non seulement portait secours, mais aussi a accueilli en sa maison la misérable : « Elle ne se contenta pas d’aider Marie Olivier, pauvre veuve, malade, mais elle l’installa dans sa propre chambre, pour la soigner jusqu’à sa mort ». Elle ne fait pas une faveur, ni davantage une œuvre de charité, au contraire, elle réalise l’acte le plus héroïque, inspiré de la Charité : traiter avec dignité et Miséricorde, le misérable....
Dans l’humble village de Sainville, « dévasté par la guerre , la faim, les épidémies, et où l’ignorance était grande », Marie Poussepin rencontre le visage de tant de petites filles sans asile, sans secours, de jeunes sans instruction et sans ressources, de malades sans assistance ni soins... Marie Poussepin, non seulement compatit, mais elle suit l’inspiration de la Providence pour répondre avec des œuvres de Miséricorde à la misère des misérables... Alors, « elle a retiré avec elle, des filles de la campagne, sans asyle et sans secours » pour « les élever dans la crainte de Dieu, leur apprendre à travailler pour gagner leur vie » et « les mettre en état de prévenir... les désordres où la misère et l’ignorance exposent » (IP).
De l’action caritative au Service de Charité au XXIè siècle
Devant tant de misère qui obscurcit le monde que Dieu non seulement a rêvé, mais a mis entre nos mains pour la réalisation de son rêve, laissons frémir nos entrailles et émouvoir notre cœur... De cette manière la Providence de Dieu nous dira comment répondre, de telle sorte que nos actions ne se transforment pas seulement en une action de charité, mais en un Service de Charité. Il découvrira dans la chair de mon frère le visage de la misère et de la douleur du Crucifié qui chemine toujours par nos rues et nos trottoirs, rencontré sur les chemins. Il vient à notre maison, cherchant un morceau de pain, un verre d’eau, un espace où se laver ou dormir, car il ne trouve pas «d’auberge» dans une société qui déprécie, écarte, ne veut pas voir et marginalise le malheureux ; Car il dérange notre tranquillité et, qui sait, questionne notre « rudesse égoïste » Une dynamique qui, comme la pieuvre, s’accroche à notre vie jusqu’à nous assimiler à l’ordre établi, nous convertissant en ses serviteurs.
La spiritualité chrétienne ne peut avoir d’autres chemins que ceux de la Miséricorde
La spiritualité chrétienne ne peut avoir d’autres chemins que ceux de la Miséricorde. Etre chrétien et fidèle à l’Evangile au XXIè siècle n’est autre que se donner soi-même, et vivre la Miséricorde en toutes ses dimensions. « Ou nous sommes miséricordieux(ses) ou nous ne sommes pas chrétien(nes)s ».
« Les œuvres de miséricorde ne peuvent passer de mode ! ».1 Encore moins en ces temps où rencontrer la Miséricorde n’est pas facile, par les chemins du monde où prédominent l’indifférence, l’individualisme, le désir véhément de défendre nos structures sans les recréer, d’être centré sur nous-mêmes, de regarder comment faire pour survivre, pendant que nos frères et nos sœurs n’ont ni courage, ni forces pour crier et faire entendre leur voix. Nous avons besoin de reconnaitre , à partir d’un regard contemplatif,, le regard de foi qui découvre le Dieu caché habitant dans les familles, les rues, les places, les écoles., « Nous avons besoin de Le contempler pour arriver à un dialogue, comme le Seigneur en a eu un avec la Samaritaine, à côté du puits où elle cherchait à étancher sa soif....ils sont très nombreux les non citoyens, les citoyens à demi intégrés et ceux « en trop » dans nos villes » ( EG 72.74).
« Dieu surmonte la misère avec la Miséricorde. Pour cela Dieu s’est humanisé. Et nous, les Humains, nous humanisons avec la Miséricorde ; et plus nous nous humanisons, plus nous nous faisons semblables à Dieu qui s’est humanisé.... Le dogme de notre foi : « Dieu s’est fait homme » se comprend correctement en disant : La Miséricorde s’est faite humaine. Le monde commence ainsi à être le Royaume de Dieu ».2 Ainsi est la dynamique que nous devons incarner en notre vie afin que nos actes ne se transforment pas en une faveur accordée, en une action charitable, mais en un acte héroïque, inspiré par la Providence de Dieu qui nous interroge : Où est ton frère ? ou nous dit : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ».
* 1 et 2 : Carlos Bazarra, "Vivir la Misericordia".